LES LARGESSES DU PROMOTEUR
Me Marie-Cécile Bodéüs, avocate de Grandpré Joli-Cœur
Les exemples de largesses du promoteur sont nombreux. Ajout ou permission en contravention à la déclaration de copropriété, il suffit d’en citer quelques-uns pour que chaque conseil d’administration reconnaisse le ou les problèmes avec lequel ou lesquels il doit ou a dû traiter: ajout d’un cabanon sur une terrasse, d’un espace de rangement supplémentaire, permission d’installer une antenne, une thermopompe ou l’installation d’un plancher de bois franc.
Les largesses de certains promoteurs ne semblent pas connaître de limites quand il s’agit d’inciter certains acheteurs hésitants ou exigeants à devenir propriétaires.
Cependant, la situation peut se dégrader rapidement lorsque le promoteur disparaît du portrait et laisse derrière lui comme cadeau au nouveau conseil d’administration le soin de gérer toutes ces soi-disant «menues» infractions à la déclaration de copropriété fraîchement publiée.
Le promoteur est-il lié par les dispositions de la déclaration de copropriété? Dans l’affirmative, son chapeau d’administrateur provisoire du syndicat de copropriété lui permet-il de donner des autorisations ou permissions spéciales comme bon lui semble?
Le promoteur est lié par les dispositions de la déclaration de copropriété et il ne peut accorder, à sa guise, des «permissions» ou «ajouts» contraires à la déclaration de copropriété, aux acheteurs d’une unité.
Dans un jugement rendu par l’Honorable Jean-Pierre Senécal dans le dossier Syndicat des copropriétaires Estuaire 1 enr. c. Royal Asselin, où le défendeur, alléguant l’autorisation du promoteur, stationnait trois véhicules sur deux espaces de stationnements, empiétant ainsi de toutes parts sur les parties communes de l’immeuble, le juge s’exprime en ces termes:
«Les espaces communs, qu’ils soient ou non à l’usage exclusif, ne peuvent être utilisés et attribués qu’en accord avec la déclaration de copropriété. Ils n’appartiennent pas au promoteur. Celui-ci ne peut en disposer à sa guise, ni en contravention de ce que prévoit la déclaration de copropriété. Le promoteur, comme tout autre, doit respecter la déclaration de copropriété. Celle-ci prévoit ses propres droits et ceux qu’il peut accorder. La déclaration de copropriété et le plan obligent tant les copropriétaires et leurs ayant-droits que le promoteur et les administrateurs. Le promoteur ne peut par ailleurs céder des droits qu’il n’a pas lui-même».
Par conséquent, les «cadeaux» du promoteur n’ont pas à être tolérés par le conseil d’administration, qui est en droit de demander la cessation de toute contravention à la déclaration de copropriété. La réponse à cette question est la même pour le promoteur sous son chapeau de premier administrateur. Il n’a pas plus de droits que ceux qui lui sont conférés par la déclaration de copropriété. Or, toute transformation, agrandissement ou amélioration des parties communes, fussent-elles à usage restreint, est soumis à l’approbation de l’assemblée des copropriétaires et non pas de l’administrateur de la copropriété.
-----------------------------------------------------------
CondoLiaison, volume 6, numéro 1